Je me souviens (les Laurentides)
Avant de poursuivre le récit de notre aventure québecoise puisque nous partons ce matin là (12 avril) de Montréal pour une autre découverte, j'ai oublié de mentionner certaines choses qui m'ont marquées depuis notre arrivée au Canada. Autant j'ai été surpris par le nombre incroyable d'annonces sur des devantures de magasins ou d'immeubles professionnels recherchant du personnel, preuve qu'on peut trouver un job pour démarrer une nouvelle vie quand on est encore jeune, autant j'ai été sidéré par le nombre de SDF réclamant une petite "piasse" pour espérer combler leur faim. S'ils n'obtiennent pas satisfaction quand nous n'avons pas sur nous la "piasse" souhaitée, ils attendent un sourire en contrepartie et répondent par des paroles amicales, à l'instar de la bonne humeur ambiante et joviale des québecois, prêts à rendre gracieusement service sans réfléchir quand ils vous sentent désemparés. Alors, autant n'avais-je pas eu le coup de foudre d'intro comme je l'indiquais dans le billet précédent, autant là mes sentiments ont pris un virage à 180°, et je dirais même plus, 180°C tant ils s'étaient réchauffés au second jour de notre présence sur ce sol.
Nous quittons donc Montréal par le sud-ouest en direction de Rigaud, bourgade située dans la Montégérie, afin de visiter la Sucrerie de la Montagne, exploitation forestière où est extrait le fameux sirop d'érable. Il fait froid ce matin-là et les touts derniers rares flocons de neige viennent ajouter un peu de piment dans ce décor d'arbres décharnés où les premiers bourgeons tardent à montrer le bout de leur nez.
Nous arrivons pour le brunch canadien dans un décor tout en bois qui nous rappelle le ranch au Texas où nous avons séjourné lors de notre dernier périple aux US. Un solide repas que nous peinons à consommer avec nos petits estomacs d'européens nous est servi, composé d'une soupe de pois, d'une épaisse omelette et patates qui ressemble à s'y méprendre au makoud judéo-tunisien (alias minina, voire tortilla espagnole) que ma maman faisait si bien, un assortiment de charcuteries (petites saucisses, bacon et jambon épais), des fèves (comme ils les appellent mais ce sont plutôt des corn-beans) en sauce, des boulettes de caribou, une tourtière québecoise, une tarte au sucre, et pour finir, des pancakes au sirop d'érable. La salle à manger est immense avec, d'un côté, une grande cheminée où flambent quelques bons gros rondins qui nous réchauffe si bien que j'ai failli terminer le repas en marcel au risque de choquer nos vieux voisins de table canadiens. De l'autre côté de la salle, des musiciens jouent un florilège folk canadien avec guitare, violon, flûte à bec, et cuillère en bois pour le jeu de jambettes. Je suis tout de même très surpris de les entendre jouer, au milieu de leur concert, une danse hassidique (sorry, me souviens plus du titre) dont on ne peut pas affirmer que ce soit franchement du cru. Voila qui va plaire à notre amie Ariana.
Nous passons ensuite à la visite de l'exploitation elle-même en commençant par la cabane à sucre où est fabriqué le sirop d'érable. Il y règne une chaleur intense due aux grandes étuves, alimentées au bois de chauffage, d'où s'échappent d'épaisses volutes de vapeur. Le brave employé nous explique, avec un accent québecois, parfois difficile à déchiffrer, le procédé de fabrication. Après quoi, lorsqu'un broc de sirop est prêt, simplement pour l'attrait touristique et la gourmandise, il le verse par petites coulées sur de la glace. Il ne nous reste plus qu'à saisir un petit bâton de bois et l'entourer du sirop instantanément durci. On appelle cela une tire d'érable. Voir tout cela dans la vidéo ci-dessous :
Après s'être repus du brunch et des tires, il ne nous reste plus qu'à aller digérer tout cela en effectuant une bonne promenade en forêt au milieu des érables sur un infini tapis de feuilles mortes jaune pâle où règnent encore parfois quelques épars amas de neige. Les seaux que vous voyez accrochés aux arbres dans la photo ci-contre ne sont pas des poubelles (ok, je ne vous prends pas pour des débiles qui ne savent pas) mais servent à la récolte de la sève de l'érable.
Nous reprenons la route vers Montréal pour repartir sur près de 50 Kms vers le nord-ouest en direction des Laurentides jusqu'à St Sauveur, notre étape pour la nuit. En fait, ce crochet était un prétexte pour nous dire que nous ne sommes pas venus au Québec que pour les grandes villes, mais aussi pour la nature et surtout la montagne même si la plus haute d'entre elles, dans la chaîne des Laurentides, culmine à moins de 1200 mètres. Imaginez la montagne à moins de 60 kilomètres de Paris, ce serait le rêve, n'est-ce pas ? La radio nous indique toutefois que nous sommes dans l'avant-dernier week-end avant la fermeture des pistes. Nous sommes en plein après-midi, alors autant pousser notre curiosité du secteur un peu plus haut vers le nord sur encore 50 Kms jusqu'à Mont Tremblant et son parc du même nom où nous côtoyons deux lacs gelés dont un nommé Lac Supérieur situé non loin des plus hautes pistes du domaine skiable. Nous ne nous y aventurons pas à pieds secs comme la période est au dégel et que la couche de glace semble peu épaisse, même si c'est très tentant. Le soleil commençant à décliner en cette fin d'après-midi, donne d'exceptionnelles couleurs à l'environnement et avive celles des toits des maisons. D'ailleurs, cette multitude de couleurs différentes des toits et des maisons elles-mêmes dans tout ce que nous avons vu au Québec aura fait fonctionner à l'excès notre appareil photo.
Pour terminer ce billet, la chanson suivante que je dédie à notre amie Elle pour lui donner du courage, tombe une fois de plus bien à propos avec notre voyage comme elle s'intitule "Avril sur Mars" et qu'il est question vers la fin des Laurentides et de Montréal, un superbe titre de Robert Charlebois issu de son album Solidaritude.